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Christine Rousselle : Plein gaz
Portrait

Christine Rousselle : Plein gaz

Cette enseignante-chercheuse à l’université d’Orléans, spécialiste de l’énergie et des moteurs, est convaincue que l’espèce humaine trouvera des solutions pour s’adapter au réchauffement climatique.
Ambre Blanes
1966 : Naissance dans le Pas-de-Calais
2016-2017 : Départ pour la Californie
2021 : Conférences TEDx sur le thème de la combustion

« Je n’avais jamais autant vu de neige de ma vie, et pourtant, je viens du Nord… » En se rappelant de son arrivée à La Source en 1986 pour y suivre des cours en école d’ingénieurs, Christine Rousselle ne peut s’empêcher de sourire. Depuis, le temps a passé, mais elle dit s’être toujours bien sentie sur ce campus : « J’adore ces bâtiments dans la forêt et voir les gens de toutes les couleurs. » Au cœur de son apprentissage d’étudiante orléanaise : l’énergie (renouvelable, à faible consommation, solaire…) et les matériaux. Dans le Loiret, elle rencontre à l’école le futur père de ses enfants, qui témoigne de la même sensibilité qu’elle pour ces domaines. Le couple cherche alors à partir à Québec mais leur voyage, trop onéreux, est remplacé par un stage au CNRS. Christine Rousselle découvre alors qu’elle est prédestinée pour la recherche. 

Devenue maman en 1994 et ayant entre-temps validé sa thèse portant sur des brûleurs, la nouvelle docteure en sciences de l’ingénieur devient maître de conférence à Polytech Orléans après avoir validé un concours post-doctorat au Centre de recherche thermique Enel (l’équivalent italien d’EDF) en Toscane. « Quelle expérience ! Je me trouvais sur de vraies centrales thermiques, entourées de fours de 50 m de haut, il faisait très chaud ! » se rappelle-t-elle. Les années qui suivent sa prise de poste à Polytech, Christine Rousselle mène des études sur les émissions de CO2 des moteurs à mélanges pauvres (consommant moins d’essence) aux côtés notamment d’Olivier Pajot, un doctorant auquel elle enseigne tout de la combustion et qui lui apprend tout du moteur. Renault choisit leur laboratoire et leur octroie le premier moteur à accès optique (ou « moteur transparent »), qui permet d’observer via des hublots comment les polluants se forment dans le moteur. Avec Peugeot-Citroën, elle initie en 2008 un projet de longue haleine : mesurer l’impact de l’hydrogène afin de l’imiter celui du CO2 en travaillant des biocarburants reconstitués. Plus tard, Christine Rousselle devient directrice de laboratoire à Polytech et crée Prisme, un laboratoire qui regroupes cinq labos existants en région Centre-Val de Loire et dans lequel elle met, c’est le cas de le dire, toute son énergie… Mais ses recherches demandent beaucoup d’investissements et en cette première partie de XXIe siècle, le monde change : en 2016, innover dans le domaine de la combustion moteur n’est plus une priorité. Christine Rousselle part alors un an en Californie, dans un laboratoire national américain situé à Berkeley, l’année où Donald Trump est élu… « Pour moi, l’étape suivante était de transformer les moteurs de camion, là où les constructeurs européens n’étaient pas encore allés, explique la chercheuse. Avec un collègue belge, nous avons ainsi formulé une thèse sur l’ammoniaque », une matière sur laquelle elle travaille pour faire rouler les voitures du futur. Dans son domaine de compétences, Christine Rousselle est ainsi au cœur des enjeux économiques et environnementaux qui secouent notre époque. « L’essence diesel telle qu’elle est utilisée de nos jours n’est plus une panacée, elle le serait cependant si nous nous montrions rationnels, explique-t-elle. Mais je suis convaincue que l’humain trouvera des solutions pour s’adapter. La nature se rééquilibre, et demain ne sera pas pareil qu’hier. Parce que nous avons une vision étriquée et que nous craignons le changement, nous avons tendance à nous rendre coupables… » Elle invite ainsi à prendre du recul sur certains thèmes où les tensions sont grandes, comme l’agriculture intensive. « C’est bien sûr une catastrophe, dit-elle, mais on ne peut pas tout changer radicalement, du jour au lendemain, pour se replier sur soi-même. Prenez le Maroc, dont l’activité agricole dépend de notre consommation : si l’on fait du protectionnisme, on ignorera un pays qui repose en partie sur nous… » 

Gouttes d’eau

Passionnée à l’idée d’activer l’esprit critique et scientifique de ses étudiants pour qu’ils se forment eux-mêmes et aient un réel impact sur le monde, Christine Rousselle a délivré il y a quelques moins une conférence passionnante au TEDxOrléans sur la question de l’énergie en 2050. D’ailleurs, elle enchaîne les conférences sur le sujet. « J’ai enfin l’impression à 56 ans que ce que je fais est un petit peu utile à la société ! sourit-elle. Je lance des petites gouttes d’eau dans ce réchauffement climatique ! Il y a tellement de choses qu’on peut encore faire… La période que l’on vit est palpitante, car tout est à réinventer… »

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