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Tamani A. : French connexions
Portrait

Tamani A. : French connexions

Arrivée il y a trois ans dans la métropole orléanaise, cette jeune Soudanaise de 29 ans a depuis réussi à trouver un poste de préparatrice en pharmacie en région parisienne. Elle voue aujourd’hui une immense reconnaissance à son pays d’adoption.
Laurence Boléat
Été 2019 : Arrivée à Orléans
 
2021 : Obtient son niveau B1 de français
 
Août 2022 : Premier emploi de préparatrice en pharmacie (en alternance)

Il aura suffi d’une photo prise dans la rue, un jour d’émeute, pour que le destin de Tamani A. bascule. Préparatrice en pharmacie dans un hôpital de Khartoum, la capitale du Soudan, la jeune femme, alors âgée de 22 ans, quitte comme chaque jour son travail. Au détour d’une rue, Tamani croise des manifestants qui s’opposent au pouvoir en place et les photographie. Quelques heures plus tard, des hommes l’attendent à son domicile, la frappent et l’embarquent de force en voiture.

Interrogée pendant plusieurs heures dans un lieu inconnu, on lui reproche donc d’avoir pris une photo. Apeurée, Tamani ne comprend pas ce qui lui arrive. Elle est relâchée plusieurs heures plus tard, mais son calvaire ne fait que commencer car, quelques jours plus tard, elle écope de trois semaines de prison. Son tort, qu’elle finira par comprendre : avoir un frère réfugié politique en France. Lorsqu’elle est libérée, Tamani s’aperçoit d’ailleurs rapidement qu’elle est sous surveillance constante à l’intérieur même de l’hôpital. Dès lors, pour fuir ces persécutions policières, la jeune femme demande un visa touristique pour visiter la France, seul moyen de quitter son pays. Elle arrive à Tours en 2018 et est d’abord logée par un ami de son frère. Elle est ensuite prise en charge par une association pour sa demande d’asile politique auprès de l’OFPRA, l’Office de Protection des Réfugiés et Apatrides, qui l’interroge sur son histoire. Commence alors un long chemin vers l’intégration, porté par la bienveillance des travailleurs sociaux qui, de son propre aveu, mettent tout en œuvre pour lui offrir un cadre sécurisant et apaisé : « J’ai été traitée de façon vraiment géniale, avec humanité, et dans une ambiance familiale indispensable pour se reconstruire », se souvient-elle aujourd’hui, le regard brillant de reconnaissance. 

Après neuf mois passés à Tours, Tamani est ensuite logée par la Croix-Rouge d’Orléans. En pleine crise Covid, elle réfléchit à son avenir avant de se convaincre qu’elle est toujours faite pour un métier médical tel qu’elle l’exerçait au Soudan. Cependant, son niveau d’études supérieures et son diplôme en biologie médicale ne lui permettent pas d’accéder à un emploi équivalent en France. Doublement convaincue par ses accompagnants et par son frère de la nécessité de maîtriser d’abord la langue française, elle prend alors le chemin de l’université. En quelques mois, elle parvient néanmoins à obtenir le B1, un diplôme qui acte un très bon niveau de français. Désormais inscrite depuis la rentrée en tant que préparatrice en pharmacie au Centre de Formation des Apprentis d’Orléans, Tamani vise aujourd’hui le master et souligne avec force ses convictions : « La France m’a offert toutes les chances, ce qui me donne l’énergie et la volonté de réussir ! » Dans un parcours semé de doutes, Tamani a également croisé la route de l’association orléanaise Aurore, moteur de sa réussite. Entre elle et sa conseillère Caroline, le courant est tout de suite passé : « J’ai détecté immédiatement son potentiel, dit cette dernière. En peu de temps, Tamani a réussi à parler très bien français, ce qui est assez rare pour être souligné. » Les deux femmes se sont ensuite attelées à l’obtention des équivalences, à commencer par celui du bac, afin d’intégrer le DEUST, et ont cherché un employeur pour commencer l’apprentissage. Après avoir visité ensemble…72 pharmacies dans la métropole et les environs, Tamani a fini par trouver un poste dans une pharmacie parisienne, tout en poursuivant ses études à Orléans.

Future citoyenne ?

Avec une parole décomplexée, la jeune femme dit souhaiter que les femmes soudanaises en exil se saisissent comme elle davantage de la liberté et du soutien qui leur sont offerts par la France. « Parmi elles, il y a des médecins et des infirmières, mais elles préfèrent rester à la maison plutôt que chercher à s’intégrer par la langue ou le travail, livre-t-elle. J’ai du mal à comprendre ! » La liberté, le mode de vie à la française et la « sincérité » de ses habitants font ainsi partie des qualités que Tamani a découvertes depuis son arrivée sur le sol hexagonal, et qui correspondent à ce qu’elle imaginait. Son rêve est d’ailleurs, aujourd’hui, d’obtenir la nationalité française.

 

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