Dès le mois de juillet, Sandra Cany, programmatrice pour la Pléiade, annonçait avoir changé son fusil d’épaule : pour le premier trimestre 2020-21, la salle de spectacle larichoise opterait pour des spectacles hors les murs et des petits formats. Bref, un programme où la distanciation physique ne serait pas un problème. Bien lui en a pris, puisque trois mois plus tard, la plupart des salles de spectacles tourangelles font face au dilemme suivant : prévoir une programmation habituelle, avec un remplissage complet de la salle, possible si l’Indre-et-Loire reste en zone verte. Ou envisager un remplissage partiel avec un siège libre entre chaque groupe de spectateurs, si le 37 passe en zone rouge. Or la bascule d’une couleur à l’autre peut se produire en quelques jours, quand programmer un spectacle se prévoit des mois à l’avance.
Pour les producteurs privés, qui ne peuvent compter que sur les recettes de la billetterie pour financer les représentations, le dilemme est vital. En juin dernier, Julien Lavergne, directeur d’AZ Prod, nous indiquait ainsi que « il nous faut un remplissage de la salle de 70 à 80 % pour amortir les frais de production : reprendre dans ces conditions, ce serait travailler à perte ». Zone rouge ou zone verte, 100 % ou 70 % de remplissage : la Covid joue donc le rôle d’épée de Damoclès, bien dangereuse pour certaines structures.
Les musiques actuelles à l’arrêt ?
Les salles financées par les fonds publics sont moins handicapées par l’aspect financier. Au Théâtre Olympia, Claire Tarou indique ainsi que « habituellement la billetterie représente 20 % de notre budget total, l’impact financier est donc réel, mais ne nous empêche pas de rouvrir, avec une salle à moitié remplie ». Et si le département est encore en zone verte les jours de représentation, des places seront alors mises en vente en dernière minute au guichet. D’autres salles ont fait ce choix, comme le CCNT ou l’Escale.
On l’aura compris : les salles publiques, avec sièges, s’en sortiront donc, et proposent d’ores et déjà au public tourangeau des saisons culturelles riches de théâtre, de danse, de musique et de rencontres. Mais pour des salles « debout » comme Le Temps Machine, à Joué-lès-Tours, l’avenir est encore obscur. À l’heure où nous écrivons, leur réouverture est interdite. La programmatrice Marie-Line Calvo et le directeur Odran Trummel sont donc à pied d’œuvre, « on travaille pour déplacer certains concerts dans des salles partenaires, et on va sans doute revoir toute la programmation pour des formats assis, en jauge réduite. Mais sans décision claire et à long terme de la part du gouvernement, on ne peut pas se projeter. Même si la décision était négative, cela nous permettrait de réfléchir à des investissements, à inventer autre chose… Mais pour l’instant ce n’est pas possible ».
Et même lorsqu’il y a réouverture, l’incertitude plane sur le retour des spectateurs en salle : inconfort du masque, crainte de l’épidémie… Les réservations progressent lentement, mais tous espèrent que la soif de culture prendra le dessus sur les peurs !