Le Pen / Zemmour : duel à Orléans

Les deux candidats à la droite de la droite ont mené la semaine dernière des actions à Orléans et dans le Loiret. L’occasion de comparer les forces en présence, la dynamique et les discours de chacun dans un contexte international très perturbé.

Benjamin Vasset


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Ils sont au coude-à-coude dans les enquêtes d’opinion et ont tous les deux tardé à recueillir leurs 500 parrainages pour concourir au premier tour de l’élection présidentielle. Plus que jamais, Marine Le Pen et Éric Zemmour semblent inséparables, comme l’a montré le calendrier récent de leurs antennes locales à Orléans. Samedi dernier, de façon visible et bruyante, environ 250 partisans d’Éric Zemmour se sont ainsi retrouvés sur les quais de Loire, à proximité des Tourelles, pour lancer leurs « 48 h de la Reconquête ». Pendant une grosse heure, Jean Messiha, Stanislas Rigault et Joachim Son-Forget ont discouru (voir encadré), avant que les troupes ne soient invités à prendre la route jusqu’à Salbris pour assister à un autre meeting mené par Guillaume Peltier et Nicolas Bay.

Entre ces deux temps forts, les militants étaient invités à aller porter la parole zemmourienne dans les villages du sud du Loiret en tapant aux portes ou en tractant. L’objectif : « Montrer qu’on existe. » L’opération a-t-elle réussi ? Difficile à dire car, pour être honnête, on n’a pas collé aux basques les militants pour voir quel avait été leur accueil dans les villages solognots sur la route de Salbris. Salbris, où le parti visait 1 000 personnes, mais où 850 personnes ont été décomptées par le parti. Évidemment, le lancement de cette opération menée un samedi, sous un beau soleil de février, était un peu plus clinquant, sur la forme, que celui orchestré deux jours plus tôt par les militants du Rassemblement national dans le Loiret pour le départ du bus de Marine Le Pen (voir photo) dans le département. Même si le véhicule en question était plutôt du genre voyant, le coup d’envoi de cette action fut donné un jeudi midi, à l’île Charlemagne, sous un ciel nuageux. « Nous sommes ici à proximité d’une base de loisirs qui accueille des familles, justifiait cependant Mathilde Paris, nouvelle déléguée départementale du Rassemblement national dans le Loiret. Car Marine Le Pen mène une campagne populaire, au service du peuple de France. » Pendant quatre jours, ce bus devait se rendre à Lorris, dans le Giennois, à Sully, à Montargis, à Courtenay avant de couvrir dimanche le nord du département afin d’aller, là aussi, « à la rencontre des habitants ». On l’aura compris : chez les partisans de Marine Le Pen comme chez ceux d’Éric Zemmour, l’idée est de ramener à eux l’électorat rural dans cette « France des oubliés » qui souffre de la hausse du prix de l’essence, notamment. 

L’Ukraine en toile de fond

Mais la semaine dernière, alors que ces deux partis montraient les muscles à Orléans, personne ne pouvait ignorer ce qui se passait à l’autre bout de l’Europe. Marine Le Pen, Éric Zemmour : deux candidats rétroactivement accusés, sitôt l’Ukraine envahie, d’une complaisance passée suspecte à l’égard de Vladimir Poutine. En décembre, Éric Zemmour avait notamment assuré, dans une émission politique, que le chef du Kremlin ne transformerait jamais en actes ses menaces. En fin de semaine, ses adversaires faisaient leur miel de cette « prédiction » pour le moins ratée. Présent à Orléans samedi dernier, le médiatique Jean Messiha jouait laborieusement au spin doctor : « Je ne vois aucun média parler de l’échec patent d’Emmanuel Macron sur ce dossier ! », déclamait-il tandis que Cyril Hemardinquer, transfuge du Rassemblement national fraîchement affidé à Reconquête (voir encadré), se refusait lui à « valider le terme d’invasion (de l’Ukraine), qui est en fait la réponse à un échec diplomatique… Il y a également eu une agression américaine manifeste à l’égard de la Russie ». D’autres cadres de Reconquête en région Centre-Val de Loire indiquaient qu’il était important de « ne pas prendre parti pour quelqu’un », affirmant que « l’Ukraine n’était pas une province française ». Zemmour au pouvoir, disaient-ils, défendra « l’indépendance de la France », « quittera le commandement intégré de l’OTAN » et ne sera plus « le valet des Américains ». Selon ses partisans loirétains, Marine Le Pen, elle, « essaiera d’apporter au niveau européen une réponse à la hauteur des enjeux et réaffirmera le rôle de la France », expliquait jeudi Mathilde Paris, « condamnant extrêmement fermement », par ailleurs, l’opération militaire russe. « Il est choquant qu’un pays puisse enclencher une guerre sur le territoire européen. On ne peut pas l’accepter. Il faut une réponse très ferme des pays européens. » 

Le plus à droite ?

Plus d’Europe pour le RN, plus de France pour Reconquête : les deux partis affichaient des différences sensibles sur le dossier de l’international, paraissant ainsi affermir la théorie selon laquelle Éric Zemmour avait recentré Marine Le Pen dans le paysage politique français. La semaine dernière, les organisations antifascistes d’Orléans s’étaient d’ailleurs mobilisées le jour de l’opération de Reconquête à Orléans, et pas celui où le bus du Rassemblement national prenait la route… « Éric Zemmour est plus clivant ; il y a un vrai rejet très fort à son encontre », analysait à ce sujet Mathilde Paris, invitée à réagir sur le fait que les Zemmouriens aient récemment qualifié Marine Le Pen de « socialiste ». « Je ne connais pas beaucoup de socialistes qui sont contre l’immigration, répondait-elle. Marine a pris le meilleur de la droite mais aussi le meilleur de la gauche. Elle porte un aspect très social. Il y a un juste milieu entre l’ultra-libéralisme et l’assistanat. De toute façon, ces notions de droite et de gauche, qui sont historiques, ne tiennent plus aujourd’hui. C’est un clivage qui n’est plus représentatif. » Et entre Marine Le Pen et Éric Zemmour, jusqu’où ira le clivage ?

 

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