Dans le Loiret, où en est la gauche ? | Tribune hebdo - L'actualité du Loiret et de l'Indre et Loire
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Dans le Loiret, où en est la gauche ?

Dans le Loiret, où en est la gauche ?

Moins audibles jusqu’à présent que leurs homologues de droite, les candidats de la gauche à la présidentielle avancent chacun dans leur couloir. Dans le Loiret, des comités de soutien et des opérations se mettent en place, avec l’impression diffuse, pourtant, que chacun avance en ordre dispersé… avant reconfiguration.
Benjamin Vasset
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Cet automne, la gauche a été la grande absente de la pré-campagne à l’élection présidentielle. Congrès des LR, emballement de la machine Zemmour… Il n’y en a eu que pour la droite, qui a pu tranquillement dérouler ses thèmes (identité, immigration, sécurité…). À gauche, la seule question qui a pu revenir aux oreilles de l’électeur lambda aura été celle de l’organisation d’une hypothétique primaire, proposée par Anne Hidalgo. « Cette histoire d’union de la gauche nous a ralentis, estime aujourd’hui Karin Fischer, conseillère régionale France Insoumise. On a tourné dans un bocal. » D’autant plus que la proposition a fini par faire flop, malgré les appels du pied réitérés d’Anne Hidalgo à Yannick Jadot (EELV).

Celui-ci a fermement éconduit son homologue du PS, avec l’idée de dire que si les socialistes proposent, ce sont dorénavant les Verts qui disposent. « En 2017, on s’est désisté au profit de Hamon, et on a vu ce qui s’est passé », abonde le conseiller municipal orléanais écologiste Jean-Philippe Grand, membre du « Conseil des Territoires » d’EELV, qui décline les inclinaisons du candidat en région. Pour lui, ce débat fait partie du passé : « cette polémique autour du choix de Jadot n’a jamais eu lieu d’être. Et je rappelle que les Verts ont montré qu’ils savaient faire des alliances en local quand c’était nécessaire ». « Moi, je comprends que Jadot ait dit non, complète Karin Fischer. C’est lui qui était en position de force. »
Aujourd’hui, les candidats de gauche paraissent donc partir chacun dans leur couloir. Arnaud Montebourg s’est désisté la semaine dernière, mais Christiane Taubira a officialisé sa candidature, qu’elle a soumise au résultat de la Primaire… Populaire, dont les résultats sont attendus dimanche. L’objectif affiché de cette consultation ? Faire émerger une candidature unique et choisie par des sympathisants de gauche, sur la base d’un jugement majoritaire. Mais pour que cette démarche ait du sens et soit légitime, il aurait fallu qu’elle soit validée par tous les candidats déclarés, ce qui n’est pas le cas. Jean-Luc Mélenchon, par exemple, a dit niet. « Cette Primaire Populaire n’a aucun respect pour les programmes sur lesquels les mouvements et les partis ont travaillé, explique Karin Fischer. Il y a un côté forcé de lobbying, porté en plus par des anciens du PS et des anciens Macronistes. » De cette nouvelle séquence, Christiane Taubira a pourtant de grandes chances de sortir gagnante. Cela suffira-t-elle à l’imposer à gauche ? Le nombre total de participants (on parle de 470 000 personnes) et l’écart avec lequel l’ancienne ministre de la Justice réglera ses concurrents aura son importance : si la participation est faible et les résultats serrés, cette Primaire Populaire ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau. À l’inverse, si elle enclenche pour Christiane Taubira une vraie dynamique dans les enquêtes d’opinion, les choses pourraient évoluer. « Aujourd’hui, je soutiens cette Primaire Populaire et je m’active pour que Christiane Taubira fasse un excellent score, mais ça ne m’engage pas pour la campagne présidentielle, indique Fabrice Van Borren, coordinateur régional du parti Nouvelle Donne. Car si Christiane Taubira stagne ensuite à 5-6 % dans les sondages, elle ne sera qu’une candidate de plus. Et si c’est pour aller voter au premier tour de la présidentielle pour un candidat de gauche qui fera 5 % des voix, ce sera sans moi. Et l’on sera beaucoup dans ce cas. »

Les jours qui viennent vont donc encore être agités à gauche, comme si chacun continuait de se toiser pour voir qui allait craquer en premier. « La séquence que l’on ouvre en ce moment sera-t-elle la séquence finale à gauche ? Je ne peux pas vous le dire », répondait ainsi la semaine dernière Christophe Lavialle, secrétaire fédéral du PS dans le Loiret, au moment de présenter le comité de soutien local à Anne Hidalgo dans le département. La « démocratie sondagière », décriée publiquement mais dont personne ne peut se passer au sein des partis, se chargera peut-être de faire le tri, à commencer par la candidature de la maire de Paris, que ses adversaires prient de débarrasser le plancher : « j’espère pour le PS qu’elle n’ira pas au bout, prévient l’écologiste Jean-Philippe Grand. Ce serait le meilleur moyen d’organiser la désunion de la gauche sur le long terme ». « Aujourd’hui, Hidalgo est coincée, énonce Fabrice Van Borren. Si elle se retire, elle va se faire torpiller en interne, mais si elle continue et qu’elle fait 3 %, elle va enterrer le PS. » L’argument financier – les candidats qui ne font pas 5 % au premier tour ne se feront pas rembourser leur frais de campagne – est brandi par les concurrents de la candidate socialiste. « Nous avons les moyens de cette campagne », balaye cependant Fanny Pidoux, délégué politique du comité de soutien loirétain à Anne Hidalgo. 

Et sur le fond…

Pour les socialistes loirétains, le moment est d’ailleurs venu de parler « des vrais sujets ». « Car on a un vrai projet chiffré, disent-ils. On représente la gauche du gouvernement. Il est encore possible d’avoir une candidature sociale-démocrate. » Sur le fond, le PS local parle d’abord d’urgence « climatique et sociale ». Et insiste sur la dernière proposition « choc » d’Anne Hidalgo, celle d’une « dotation en capital » de 5 000 € pour tous les jeunes de 18 ans pour financer des projets personnels ou professionnels. Une sorte d’« allocation universelle » sur laquelle La France Insoumise ironise : « le PS nous court après ! OK, c’est toujours mieux que rien, mais il y a dans cette proposition une approche néo-libérale menée dans un esprit « appel à projets » . Avec notre allocation d’autonomie de 1 063 €/mois pour les jeunes qui étudient à la fac et en lycée professionnels, on a nous une position plus cohérente et plus ambitieuse ». Les Verts, eux, brandissent leur « revenu citoyen de 880 € mensuels pour tous les jeunes de 18 à 25 qui en feraient la demande », d’après Jean-Philippe Grand. Et les communistes ont confirmé lundi, par la voix de Fabien Roussel, leur volonté d’instaurer un revenu étudiant de 850 €. 

Les propositions existent donc à gauche, mais elles restent difficilement audibles. Peut-être parce qu’entre elles, il y a parfois des différences qui sont du domaine de la nuance, même si chacun veut s’accrocher à ses spécificités et prouver son degré de rupture avec le système actuel, rendant ainsi la possibilité d’une union de plus en plus chimérique au fur et à mesure que les heures passent. « Il est temps de reconnaître que les écologistes sont ceux qui portent les idées qui vont nous permettre de continuer à vivre sur cette planète et de comprendre que nos méthodes sont les plus logiques en termes de sobriété, de rénovation des bâtiments, de travail sur le chauffage et de protection du vivant », assène ainsi Jean-Philippe Grand. Chez les Insoumis, on raille pourtant les « positions euro-béates » d’EELV et on griffe en même temps les « copains » communistes. « Il faut distinguer le fonds des appareils, lance Karin Fischer. Les Insoumis ont beaucoup de points communs avec les communistes, mais le PC, avec la candidature de Fabien Rousse, préfère survivre plutôt que changer de monde. » Difficile de croire en un destin commun quand on s’envoie des roses aussi épineuses. Fabrice Van Borren, de Nouvelle Donne, craint d’ailleurs une campagne « terrible » qui se profile à gauche. « Chacun va vouloir se battre pour sa survie, et si, en plus, Christiane Taubira se maintient, on va lui faire porter le chapeau de la désunion… » 

« qui c’est les plus forts ? »

Bien qu’ils s’en défendent publiquement, les partis et mouvements de gauche semblent déjà jouer le coup d’après ; l’idée étant de sortir le moins esquinté d’ici au premier tour, d’y faire le meilleur score et de devenir ensuite le panache blanc derrière lequel les autres seront obligés de se ranger. C’est dans ce contexte que se prépareront alors les élections législatives. En local, c’est un vrai enjeu : Verts et PS montrent déjà les muscles et annoncent qu’ils seront en capacité de présenter des binômes dans chaque circonscription du Loiret. Les socialistes parlent également de discussions déjà engagées avec les communistes, mais pas avec les Verts. Chez les Insoumis, on avance aussi la présence de « chefs de file » dans les circonscriptions – qui ne seront pas automatiquement candidats – mais dont la désignation dépendra de consignes nationales et du rapport de force engendré par les résultats du premier tour à la présidentielle. Pour la gauche, cette présidentielle semble à la fois la fin et le début de quelque chose.

NB : Contacté, le Parti communiste du Loiret n’a pas répondu à nos appels.

 

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